Règlement relatif aux traducteurs-jurés

I 2 46.03

du 6 décembre 2004

(Entrée en vigueur : 14 décembre 2004)

Le CONSEIL D’ETAT de la République et canton de Genève

arrête :

Chapitre I           Principe et conditions

Art. 1           Principe

1 L'activité de traducteur-juré consiste à traduire par écrit, principalement à partir d'une langue étrangère vers le français, ou subsidiairement, du français vers une langue étrangère, tout document nécessitant une certification officielle.

2 L’assermentation n’est pas accordée pour le seul exercice de la traduction du français vers une ou plusieurs langues étrangères.

Art. 2           Conditions

1 Selon le principe défini à l’article 1, l’assermentation en qualité de traducteur-juré peut être sollicitée par toute personne remplissant les conditions suivantes :

a)   être titulaire d'un diplôme universitaire de traduction et justifier, postérieurement à son obtention, d'une pratique de la traduction, essentiellement dans le domaine juridique, exercée à titre d'activité professionnelle régulière pendant 3 ans, compris dans un délai de 5 ans précédant immédiatement la demande d'assermentation;

b)   ou être titulaire d'une licence universitaire notamment en droit, en économie, en sciences politiques ou en lettres et justifier, postérieurement à son obtention, d'une pratique de la traduction, essentiellement dans le domaine juridique, exercée à titre d'activité professionnelle régulière pendant 5 ans, compris dans un délai de 7 ans précédant immédiatement la demande d'assermentation;

c)   être de nationalité suisse ou titulaire d'un permis d'établissement ou encore d'une autorisation de séjour durable et être autorisé à exercer une activité lucrative indépendante;

d)   être domicilié en Suisse depuis 3 ans dont la dernière année à Genève;

e)   offrir par ses antécédents et son comportement toute garantie d'honorabilité et de solvabilité;

f)    ne pas être au bénéfice d'un contrat de travail ou de tout autre rapport contractuel impliquant un lien de subordination, pour une part importante de son activité professionnelle, auprès d'une collectivité ou administration publique locale, nationale ou internationale, ou encore auprès d'une représentation diplomatique étrangère.

2 Les conditions énoncées à l’alinéa 1 doivent être maintenues pendant toute la période durant laquelle le traducteur-juré est autorisé à exercer cette activité et à en porter le titre. Le traducteur-juré doit en particulier conserver son domicile à Genève.

3 L’assermentation peut être sollicitée pour 4 langues au maximum.

Chapitre II          Procédure d'assermentation

Art. 3           Requête au Conseil d'Etat

1 Pour être autorisées à porter le titre et à exercer l'activité de traducteur-juré dans le canton, les personnes remplissant les conditions énumérées à l'article 2 doivent en faire la demande au Conseil d'Etat.

2 Cette demande est à adresser à la chancellerie d'Etat avec les précisions et pièces justificatives suivantes :

a)   une lettre de candidature, présentée dans toutes les langues sollicitées y compris le français, avec des explications détaillées sur les raisons pour lesquelles le candidat souhaite être assermenté en qualité de traducteur-juré, et mentionnant si possible toute personne de référence;

b)   toutes pièces justificatives permettant d'établir que les conditions énumérées à l'article 2 sont remplies, ainsi que toutes précisions sur le statut professionnel actuel du candidat.

3 La procédure décrite aux alinéas 1 et 2 du présent article s’applique également aux demandes d’assermentation complémentaire.

Art. 4           Instruction

1 Après s'être assurée que le dossier est complet et que les conditions énumérées à l'article 2 sont remplies, la chancellerie d'Etat soumet la candidature au département de justice, police et sécurité pour préavis.

2 Si le préavis du département de justice, police et sécurité est positif, la chancellerie d'Etat soumet le dossier de candidature à la commission d'examen des traducteurs-jurés, prévue à l'article 14.

3 Cette commission vérifie l’admissibilité du candidat à l’examen d’aptitude, au regard des documents produits et visés à l’article 2 du présent règlement.

Art. 5           Examen d’aptitude

1 La commission d’examen des traducteurs-jurés contrôle les connaissances du candidat en français et dans les langues pour lesquelles ce dernier sollicite l’assermentation.

2 Les modalités de l’examen d’aptitude sont définies par la commission et portées à la connaissance du candidat lors de la convocation à l’examen.

3 A l’issue de la procédure d’examen, la commission émet un préavis à l’intention de la chancellerie d’Etat.

Art. 6           Emolument

1 Lors de la convocation à l’examen d’aptitude, le candidat est invité à s’acquitter d’un émolument qui s’élève à :

a)   émolument de base pour la première combinaison linguistique

300 F

b)   émolument complémentaire pour chaque combinaison linguistique supplémentaire

150 F

2 Le candidat doit s’acquitter de l’émolument dû avant le début de la session d’examens pour laquelle il est convoqué. A défaut, il n’est pas admis à participer à cette session.

3 L’émolument est acquis à la chancellerie d’Etat, sauf absence à l’examen d’aptitude pour justes motifs dûment établis par pièces justificatives.

Art. 7           Assermentation

1 En cas de préavis favorable de la commission d'examen des traducteurs-jurés, la chancellerie d'Etat soumet la candidature de l'intéressé au Conseil d'Etat en vue de son assermentation.

2 Le Conseil d’Etat statue souverainement, notamment en fonction des besoins.

3 La personne dont la candidature a été admise par le Conseil d’Etat prête le serment suivant :

« Je jure ou je promets solennellement :

-     de remplir avec dévouement les devoirs de la fonction à laquelle je suis appelé ;

-     de me conformer complètement à ce qu’exigent les lois et règlements qui la concernent ;

-     et, en général, d’apporter à l’exécution des travaux qui me sont confiés, fidélité, discrétion, zèle et exactitude. »

4 Dès qu'il a été assermenté, le traducteur-juré est autorisé à porter ce titre et à exercer cette activité.

Art. 8           Refus d'assermentation

1 Lorsque la demande d’un candidat est écartée pour un motif autre que l’échec à l’examen d’aptitude, le Conseil d’Etat déclare sa demande irrecevable. Il en va de même lorsqu'un candidat n'a pas été admis à participer à la session d'examen en raison du non-paiement de l'émolument, ou lorsqu'il ne s'est pas présenté à l'examen d'aptitude sans motif valable, ou, en cas de nouvelle requête, si le délai fixé à l’alinéa 2 n’est pas respecté.

2 Lorsque le Conseil d'Etat a refusé l'assermentation en raison de l'échec à l'examen d'aptitude, l'intéressé peut présenter une nouvelle requête, pour les mêmes combinaisons linguistiques, après écoulement d'au minimum une année dès l'entrée en force de la décision de rejet.

3 Trois échecs à l'examen d'aptitude excluent définitivement l'assermentation pour la ou les combinaisons linguistiques considérées.

Chapitre III        Statut des traducteurs-jurés et commission d'examen

Art. 9           Sceau

1 Les traducteurs-jurés reçoivent, après leur assermentation, un sceau comportant leur nom, prénom, qualité, ainsi que les armoiries du canton.

2 Ils sont tenus de restituer d'office ce sceau à la chancellerie d'Etat, si leur autorisation est suspendue ou prend fin.

Art. 10         Tableau

La chancellerie d'Etat dresse un tableau des traducteurs-jurés, qui est publié mensuellement dans la Feuille d'avis officielle.

Art. 11         Obligations et responsabilités

1 Les traducteurs-jurés ne peuvent apposer leur sceau que sur les traductions réalisées dans les combinaisons linguistiques pour lesquelles ils ont été assermentés.

2 Ils sont tenus de procéder en priorité aux traductions qui leur sont demandées par les services de l'Etat.

3 Ils sont également tenus d'effectuer en priorité les traductions, ainsi que les révisions de traductions réalisées par des tiers, qui leur sont demandées par les particuliers lorsqu'elles nécessitent une certification officielle.

4 Les traductions de documents officiels ne peuvent être effectuées qu'à partir de pièces originales ou de copies certifiées conformes par un officier public suisse.

5 Les traducteurs-jurés ont l'obligation de rendre des textes sur support papier, dactylographiés ou informatisés et d'une présentation impeccable. Sur chaque page de traduction, le traducteur-juré doit apposer son sceau et son paraphe. La dernière page doit comporter son sceau ainsi que sa signature complète et originale.

6 Ils sont personnellement et exclusivement responsables des travaux qu'ils réalisent et sur lesquels ils apposent leur sceau.

7 Il est fait interdiction aux traducteurs-jurés d'effectuer des traductions en relation avec leurs propres affaires professionnelles ou personnelles ou encore avec les affaires professionnelles ou personnelles de leur employeur.

8 Ils sont tenus de garder le secret sur les traductions qu'ils effectuent.

9 Ils ont l'obligation d'aviser la chancellerie d'Etat de tout changement d'adresse ainsi que de toute modification de leur statut professionnel.

10 L'activité de traducteur-juré est compatible avec celle d'interprète.

Art. 12         Tarif

1 Le prix des traductions est calculé sur la base du nombre de lignes dactylographiées de 70 frappes (espaces compris). Les lignes commencées sont groupées pour former des lignes entières. Les chiffres et tableaux sont convertis en lignes normalisées. Le texte de la langue d'aboutissement fait foi pour le calcul des lignes. Toutefois pour les langues idéographiques, le décompte des lignes est effectué à partir du français.

2 Le prix minimum par document unique est de 75 F.

3 Le tarif des traductions est fixé par groupe de langues. Le prix du groupe de langues le plus élevé est toujours déterminant pour le calcul. Les fourchettes suivantes sont applicables:

Groupe de langues

Prix par ligne

 

1.

langues latines et germaniques.......................

3,50

F

à

4,50

F

2.

autres langues européennes...........................

4,50

F

à

5,50

F

3.

langues non-européennes...............................

5,00

F

à

8,00

F

Le montant le plus bas de la fourchette correspond au prix minimum conseillé et le montant le plus élevé au prix maximum autorisé.

4 Lorsqu'une mise en page identique à l'original est demandée, un supplément jusqu’à 20 F par page peut être facturé.

5 Les traducteurs-jurés peuvent, sur devis écrit uniquement, exiger un supplément de 50 à 100 % pour les travaux urgents ou pour ceux qui exigent un travail de nuit ou durant les jours fériés.

6 Les travaux de vérification et de certification conforme de traductions effectuées par d'autres traducteurs sont de 50 % du tarif applicable selon les dispositions du présent article.

7 Lorsque le traducteur-juré est appelé, dans le cadre d’un même mandat, à traduire plusieurs documents dont seules les références et/ou les noms propres varient, sans modification du corps du texte, le premier document traduit est facturé conformément au tarif ci-dessus, les autres documents ne peuvent être facturés qu'à la moitié du prix de la première traduction.

8 Lorsque le traducteur-juré est appelé à établir plusieurs exemplaires originaux identiques pour un seul client, le premier document traduit est facturé conformément au tarif ci-dessus, les autres documents sont facturés à raison de 20 F par page.

Art. 13         Validité et renouvellement de l'autorisation

1 Tous les 5 ans, à compter de l'assermentation ou du dernier renouvellement de l'autorisation, la chancellerie d'Etat vérifie que le traducteur-juré remplit toujours les conditions nécessaires à exercer cette activité et à en porter le titre.

2 Elle contrôle notamment le domicile de celui-ci, son statut professionnel et s'il a une pratique régulière de la traduction dans les combinaisons linguistiques pour lesquelles il a été assermenté.

3 La confirmation de l'autorisation pour une nouvelle période de 5 ans a lieu par simple lettre de la chancellerie d'Etat.

Art. 14         Commission d'examen des traducteurs-jurés

1 Les membres de la commission d'examen des traducteurs-jurés sont nommés pour 4 ans par le Conseil d'Etat, au début de chaque législature.

2 La commission précitée se compose de 3 membres ayant chacun un suppléant, soit:

a)   un représentant de la chancellerie d'Etat;

b)   un représentant du département de justice, police et sécurité;

c)   un représentant de l'Association suisse des traducteurs-jurés.

3 La commission a pour tâche d'examiner l'aptitude des candidats à exercer l'activité de traducteur-juré et d'émettre un préavis à l'intention de la chancellerie d'Etat. Elle peut également être amenée à donner un préavis sur toute question que la chancellerie d'Etat lui soumet en rapport avec l'autorisation d'exercer l'activité de traducteur-juré et le port de ce titre.

4 Les membres de la commission ont droit à des jetons de présence selon le tarif fixé par le Conseil d'Etat.

5 Au surplus, la loi concernant les membres des commissions officielles, du 24 septembre 1965, s'applique.

Chapitre IV         Sanctions et voies de droit

Art. 15         Sanctions

1 Si le traducteur-juré n'est plus en mesure d'assumer son autorisation, ne remplit plus les conditions énumérées à l'article 2 ou si son autorisation ne peut être renouvelée, le Conseil d'Etat soit suspend l'autorisation de l'intéressé, soit le raye du tableau des traducteurs-jurés.

2 En cas de plainte fondée notamment au sujet de la qualité des traductions ou de délais exagérés, la chancellerie d'Etat prend toutes mesures utiles à l'encontre du traducteur-juré. Elle peut en particulier proposer au Conseil d'Etat la suspension de son autorisation.

3 Dans les cas graves ou lors de plusieurs plaintes fondées, le Conseil d'Etat peut, sur proposition de la chancellerie d'Etat, rayer l'intéressé du tableau des traducteurs-jurés.

4 Les litiges entre les traducteurs-jurés d'une part et leurs clients d'autre part relèvent des tribunaux civils ordinaires.

Art. 16         Réclamation et recours

1 Les décisions de la chancellerie d'Etat peuvent faire l'objet d'une réclamation dans un délai de 30 jours dès leur notification.

2 Le recours au Tribunal administratif est régi par les articles 56A et suivants de la loi sur l’organisation judiciaire, du 22 novembre 1941, et par la loi sur la procédure administrative, du 12 septembre 1985.

Chapitre V          Dispositions finales et transitoires

Art. 17         Clause abrogatoire

Le règlement relatif aux traducteurs-jurés, du 5 juillet 2000, est abrogé.

Art. 18         Entrée en vigueur

Le présent règlement entre en vigueur le lendemain de sa publication dans la Feuille d'avis officielle.

Art. 19         Dispositions transitoires

1 Le présent règlement s'applique aux faits survenus postérieurement à sa date d'entrée en vigueur.

2 L’article 2, alinéa 1, lettres a et b, ne s'applique pas aux traducteurs-jurés assermentés avant le 13 juillet 2000, sous réserve des demandes d'assermentation déposées après cette date pour une ou des combinaisons linguistiques complémentaires.

Certifié conforme

Le chancelier d'Etat : Robert Hensler